Climat Réunion La formation des nuages sur l'île de la Réunion

Météo-France

La formation des nuages sur l'île de la Réunion

26/01/2022

Convection, advection, débordement, front de brise, soulèvement orographique, on vous dit tout - ou presque - sur le développement des nuages à la Réunion.

Les nuages sont constitués d'eau sous forme de gouttelettes et/ou de cristaux de glace en suspension dans l'air. Ces gouttelettes proviennent de la condensation de la vapeur d'eau (gaz invisible) contenue dans l'air. La quantité maximale de vapeur d'eau est fonction de la température de l'air. À chaque température correspond un seuil de "saturation" d'humidité au-delà duquel il y a condensation et apparition de gouttelettes. Plus l'air est chaud, plus il peut contenir de vapeur d'eau. C'est en partie pour cette raison que les précipitations sont plus intenses pendant la saison chaude que pendant la saison fraîche. La formation du nuage sera toujours due à un refroidissement de l'air. Les principaux mécanismes à l'origine de la formation des nuages sur l'île de La Réunion sont la convection, le soulèvement orographique et les convergences de basses couches.

La convection

Le réchauffement de la surface se communique à l'air qui, dilaté donc plus léger, se met à monter et se refroidit. Les nuages de convection apparaissent alors. Les mouvements convectifs donnent naissance à des nuages de type cumuliforme. Sur l'océan Indien, la température de la surface de la mer et l'humidité sont suffisantes pour entretenir des mouvements convectifs tout au long de la journée dans les basses couches de l'atmosphère. Sur l'île de La Réunion, les nuages se forment en cours de journée selon une chronologie relativement immuable :

  • le matin, le soleil réchauffe les pentes et les premières ascendances se forment ;
  • les ascendances donnent naissance à des brises de pentes et sont désormais suffisamment puissantes pour provoquer la condensation de la vapeur d'eau et entraîner la formation des premiers cumulus ;
  • à la mi-journée, le réchauffement devient plus important et renforce les ascendances et les brises de pentes. Les cumulus grossissent ;
  • si aucune inversion ne limite l'altitude des ascendances, les cumulus grossissent encore au point d'atteindre le stade de cumulonimbus. De fortes averses se produisent alors, parfois accompagnées de coups de tonnerre. Il est à noter que les précipitations, en s'évaporant, absorbent une partie de la chaleur de l'atmosphère et par conséquent refroidissent les basses couches de l'atmosphère, détruisant ainsi les ascendances à l'origine du cumulonimbus ;
  • en fin de journée, le soleil ne réchauffe plus suffisamment les pentes pour entretenir les ascendances et les brises de pente. Les nuages se désagrègent progressivement. La nuit, le sol perd de la chaleur par rayonnement et ce refroidissement ne permet plus la formation de nuages convectifs. Le même cycle reprend au cours de la matinée suivante lorsque le soleil réchauffe suffisamment les pentes. Ce mécanisme est à l'origine de la formation quasi-systématique des nuages qui recouvrent les hauts de La Réunion l'après-midi.

Formation des nuages par convection

Advection et soulèvement orographique

Les nuages cumuliformes, qui se forment au-dessus de l’océan Indien par le biais des mouvements convectifs, sont transportés par le vent. On parle alors d’advection. Lorsque les particules d’air abordent la façade au vent de l’île, elles subissent un soulèvement dû à la présence du relief. Cette ascendance refroidit ces particules d’air puis entraîne éventuellement la formation de nouveaux nuages localisés sur les contreforts du relief au vent.

Quand un nuage, poussé par les alizés, aborde le relief, il subit ce soulèvement orographique. Les ascendances à l’origine de la formation du nuage se renforcent et le nuage devient plus actif. Ce regain d’activité se manifeste par l’apparition ou le renforcement des précipitations associées.

Ce mécanisme d’advection et de soulèvement orographique est à l’origine des forts cumuls de précipitations observés sur la façade est de l’île tout au long de l’année et du fort contraste pluviométrique entre la façade au vent et la façade sous le vent. Mais il suffit que le flux directeur change pour que le phénomène se transpose aux autres micro-régions de l’île. C’est le cas, par exemple, lors des remontées de fronts actifs où le flux de secteur sud pousse les masses nuageuses du front sur les façades sud-ouest et dans le cirque de Cilaos.

Lors des épisodes cycloniques, ce phénomène est exacerbé car des masses nuageuses d’extension verticale supérieure à 10 km - donc chargées de quantités phénoménales d’eau liquide et de vapeur d’eau - sont « projetées » sur le relief de La Réunion par les vents cycloniques. Ces épisodes sont régulièrement à l’origine de nouveaux records mondiaux de précipitations.

Soulèvement orographique

Débordement

Sur les hauts et les remparts de l'île, la convection débute en cours de matinée. Le matin, les versants E (est) sont orientés perpendiculairement aux rayons du soleil. Les premiers nuages apparaissent donc en premier lieu sur ces versants. L'après-midi, le soleil bascule à l'ouest et réchauffe plus efficacement les versants ouest. Le réchauffement est d'autant plus efficace sur ces versants que, par flux classique d'est-sud-est, ils se trouvent à l'abri des alizés et sont donc peu ventilés. Ces deux raisons - position du soleil et vent faible ne dissipant pas la chaleur accumulée - font que la convection est régulièrement plus intense sur les versants sous le vent. Les nuages s'accumulent alors sous l'inversion puis "glissent" en direction du littoral, poussés par le flux d'alizé que l'on retrouve en altitude au-dessus des pentes et des remparts. Lorsque l'inversion est basse (figure ci-contre), les nuages sont peu épais et apportent juste de l'ombre sur les régions littorales.

Dans le cas d'une inversion élevée, les averses qui débutent dans les hauts atteignent localement le littoral.

Débordement avec inversion basse

Débordement avec inversion élevée

Le front de brise

Sur la façade au vent, la brise de terre nocturne s'écoule vers l'océan et fait face directement au flux d'alizé. Les deux flux convergent et créent une zone d'ascendance à l'origine de la formation d'une bande nuageuse, précipitante ou non : le front de brise. Tant que la brise est établie, cette bande nuageuse reste à quelques encablures de la côte.
Au petit matin, les rayons du soleil réchauffent les pentes et la brise s'inverse. La bande nuageuse, née de la convergence entre la brise de terre et le flux d'alizé est alors poussée vers la côte, entraînant un bref épisode pluvieux sur la façade au vent.

  • Front de brise la nuit

    Front de brise la nuit

  • Front de brise le matin

    Front de brise le matin

  • Front de brise la nuit

    Front de brise la nuit

  • Front de brise le matin

    Front de brise le matin

L'ennuagement dans les cirques

Les cirques de Cilaos et de Mafate sont, une bonne partie de l'année, protégés par leurs remparts des advections de nuages. Le processus de la formation quasi-quotidienne des nuages est très semblable d'un jour à l'autre.

  • Le matin, le soleil frappe en premier lieu le rempart ouest alors que le rempart est reste à l'ombre. Les premières ascendances naissent sur le flanc du rempart au soleil et les premiers cumulus apparaissent.
  • En fin de matinée, l'ensemble du cirque est exposé au soleil. Les brises de pentes sont plus importantes sur les flancs des remparts. Au pied des remparts, les ascendances doivent être compensées par un afflux d'air. Cet afflux provient du courant qui redescend du sommet des nuages sensiblement vers le coeur du cirque. Ce courant subsident empêche la formation de nuages au dessus de la zone centrale du cirque.
  • En fin d'après-midi, le cirque repasse progressivement à l'ombre. La circulation des particules d'air se désorganise. Les nuages s'étalent, recouvrant la totalité du cirque, puis se dissipent en cours de nuit. Un cycle semblable reprend le lendemain matin.

L'ennuagement dans le cirque de Salazie est plus complexe car c'est le seul qui présente une étroite ouverture orientée au vent, résultat de l'érosion par la rivière du Mât. Les nuages, advectés par les alizés, s'accumulent dans ce corridor et restent bloqués sans atteindre le fond du cirque.

  • Des précipitations se produisent alors régulièrement à partir du pont de l'Escalier jusqu'au village de Salazie.
  • A partir de Salazie, les parois du cirque s'écartent et des mouvements subsidents apparaissent, entraînant la dissipation des nuages. Grand-Îlet et Hell-Bourg, situés au fond du cirque, sont régulièrement plus ensoleillés que Salazie situé à l'entrée du cirque.
  • Cependant, quand les alizés sont suffisamment humides, les nuages débordent sur Hell-Bourg par le rempart de Bélouve. Dans ces situations, seul le village de Grand-Îlet reste à l'abri.
  • À ce processus d'ennuagement par advection, il faut ajouter celui de la convection qui débute le matin et se poursuit la journée.

La combinaison des deux phénomènes - advection et convection - rend la prévision du temps plus difficile dans le cirque de Salazie que dans ses deux voisins Mafate et Cilaos.

  • Ennuagement dans les cirques le matin

    Ennuagement dans les cirques : matin

  • Ennuagement dans les cirques l'après-midi

    Ennuagement dans les cirques : après-midi

  • Ennuagement dans les cirques le soir

    Ennuagement dans les cirques : soir