Prévision saisonnière Prévisions 2024-2025

Prévision saisonnière d’activité cyclonique  dans le Sud-Ouest de l’océan Indien : Saison 2024-2025.

31/10/2024

La saison cyclonique 2024-2025 devrait être caractérisée par une activité proche ou supérieure à la normale à l’échelle du bassin cyclonique du Sud-Ouest de l'océan Indien. On estime qu’entre 9 et 13 systèmes (tempêtes et cyclones) pourrait se développer, avec 4 à 7 d’entre eux atteignant le stade de cyclone tropical. Si cette année les zones de genèses seront privilégiées sur la moitié Est du bassin, on s’attend à des trajectoires cycloniques majoritairement orientées vers l’Ouest ou le Sud-Ouest, pouvant amener les phénomènes cycloniques à menacer les terres habitées de la partie Ouest du bassin.

Nous estimons en effet qu’il y a une probabilité de 50% de connaître une activité supérieure à la normale, une probabilité de 40% pour que l'activité cyclonique soit proche de la normale et une probabilité de seulement 10% pour que l’activité soit inférieure à la normale1. On s'attend à avoir au final 9 à 13 phénomènes cycloniques* sur le Sud-Ouest de l'océan Indien (normale à 10), dont 4 à 7 deviennent des cyclones tropicaux (normale à 5).

* Cette fourchette tient compte de la tempête tropicale ANCHA qui a évolué début octobre.

Prévisions d'activité cyclonique 2024-2025

Cette année, le contexte de grande échelle change sensiblement par rapport à l’année dernière. Des températures de mer plus chaudes que la normale et une activité pluvio-orageuse intense sont attendus sur le centre et l’Est du bassin (l’année dernière, c’était la partie Ouest). Cette configuration devrait favoriser la formation des phénomènes cycloniques sur ces secteurs (assez loin des terres habitées donc). Toutefois, on ne s’attend pas pour autant à un impact atténué. Une majorité de trajectoires seront orientées vers l’Ouest ou le Sud-Ouest, amenant alors potentiellement ces systèmes à impacter les terres habitées de la partie Ouest. Contrairement aux 3 dernières saisons cycloniques où il a fallu attendre le mois de janvier pour connaître les premiers systèmes impactants, ces potentiels impacts pourront commencer plus précocement, possiblement avant la fin de l’année 2024.

Distribution de l'activité

Les flèches en noires indiquent les types de trajectoires privilégiés. Les flèches en gris, les types de trajectoires moins privilégiés. Compte tenu de l’activité envisagée, le nombre de formation de tempêtes par zone illustre une répartition possible de l’activité.

Il convient donc de mettre en œuvre dès à présent et comme chaque année, les précautions d’usage de début de saison cyclonique. Rappelons que pour un endroit donné, il suffit d’un seul système pour connaître un impact pouvant être catastrophique.

 

Contexte de grande échelle attendu sur le bassin pour l'été 2024-2025.

Au niveau global, après le El Nino de l’été austral 2023-2024, le scénario d’un épisode La Nina dans le Pacifique équatorial est incertain. Si celui-ci devait apparaître, il sera faible et de courte durée (à priori essentiellement entre novembre et janvier). On rappelle que ce phénomène, bien que se produisant à bonne distance de notre région, influe fortement dans la variabilité du climat de la planète et particulièrement du climat des zones tropicales.

Au niveau régional, une phase négative du Dipôle de l’Océan Indien (DOI) de faible amplitude pourrait temporairement se manifester au mois de novembre avant de s’estomper au-delà. Elle se traduit par la présence d’eaux un peu plus fraîches et une atmosphère plus sèche que la normale sur l’océan Indien équatorial Ouest (nord Seychelles, large de la Somalie), alors que les conditions sont plus humides et les eaux plus chaudes sur l’océan Indien équatorial Est (vers l’Indonésie). Ce différentiel présent en début de saison va s’estomper, comme habituellement, avec, à partir de décembre, l’établissement d’un flux de mousson tout au long de l’équateur de l’hémisphère nord vers l’hémisphère sud.
Le scénario est beaucoup moins clair en ce qui concerne l’évolution du dipôle subtropical de l’océan Indien (DSOI – même principe de dipôle exposé ci-dessus mais dans les régions subtropicales du Sud Indien) qui est actuellement neutre. On envisage soit une bascule vers une phase positive (dont l’amplitude reste toutefois incertaine) soit un maintien au neutre.

Au-delà de ces facteurs connus influant sur la variabilité climatique, soulignons que l’océan Indien est également marqué par des eaux anormalement chaudes à proximité de l’archipel des Chagos (plein centre de l’océan Indien Sud tropical). Cette situation est installée depuis plusieurs mois et tout laisse à penser qu’elle va se maintenir au moins une partie de la saison et jouer un rôle sur l’activité cyclonique. Elle a d’ailleurs vraisemblablement contribué à l’éclosion de l’activité perturbée déjà observée sur le bassin à ce jour (Perturbation Tropicale n°01 en aôut et Tempête Tropicale ANCHA début octobre – ces 2 systèmes ont évolué à relative proximité des Chagos).

Anomalies (en °C) des températures de surface de la mer sur l’océan Indien en ce printemps austral 2024. La situation est caractérisée par des signaux plutôt faibles des modes de variabilité connus (DOI, DSOI). Source: nasa

Dans ce contexte, quelle réponse attendre de l’activité cyclonique sur le Sud-Ouest de l’Océan Indien ?

Malgré des signaux plutôt faibles/incertain concernant l’état ou l’évolution des facteurs climatiques connus (ENSO, DOI, DSOI), la présence d’eaux anormalement chaudes sur le centre et l’Est du bassin devrait renforcer à la fois l’activité pluvieuse et le cyclonisme de la Zone de Convergence Intertropicale de cœur d’été (le Talweg de Mousson) dans ce secteur. C’est donc avec un bon degré de confiance qu’on s’attend à une répartition différente des lieux privilégiés de formation des systèmes par rapport à l’année dernière (la plupart des systèmes s’étaient formés sur l’Ouest du bassin) avec un déport du foyer principal vers l’Est assez loin des terres habitées. Cette activité renforcée de la ZCIT dans un secteur habituellement propice à la formation des tempêtes, devrait ainsi contribuer à tirer l’activité de la saison vers le haut. Un cisaillement de secteur Est plus fort que la normale et la proximité d’air sec en provenance de l’océan Indien équatorial ouest, pourrait toutefois rendre laborieux un certain nombre de cyclogenèses.

En cas de développement d’une phase positive marquée du DSOI (traditionnellement à partir du mois de janvier), de l’air sec des subtropiques viendrait inhiber le potentiel océanique important présent au niveau des Chagos, accompagné de pressions atmosphériques supérieures à la normale sur les Mascareignes. Ce n’est pas le scénario privilégié à l’heure actuelle mais compte tenu de sa faible prévisibilité, on ne peut pas complètement l’exclure. Cette éventualité tirerait l’activité finale de la saison vers le bas de la fourchette envisagée (saison normale autour de 9-10 systèmes).

Concernant la typologie des trajectoires, le degré de confiance apparaît moins bon, compte tenu entre autres du manque de signal de l’ENSO et du manque d’unanimité des modèles utilisés sur la prévision des paramètres contrôlant la trajectoire des tempêtes/cyclones (cf. figure ci-dessous). Toutefois une tendance de trajectoires au final assez climatologique (zonales à paraboliques) se dégage des méthodes appliquées. Contrairement à l’année dernière, la composante méridienne voire s’orientant durablement vers le sud-est devrait être nettement moins représentée.

Dans ce genre de configuration, les terres habitées habituellement exposées aux impacts cycloniques (côte du Mozambique, Madagascar et particulièrement sa côte est, les Mascareignes dans leur globalité) vont être soumises à un risque à minima « climatologique » voire potentiellement plus important compte tenu des probabilités assez élevées d’activité supérieure à la normale.
Signalons qu’aucune temporalité n’apparaît dans ce scénario. Après 3 saisons cycloniques successives où les impacts sur les terres habitées ont démarré au mois de janvier, le premier système impactant pourrait bien avoir lieu avant la fin de l’année 2024.

Anomalies de la composante zonale du vent vers 5000 mètres prévues pour le trimestre Janvier-Février-Mars par 3 modèles de climat. Les zones repérées avec les flèches, situées de part et d’autre de 10°S, illustrent un cyclonisme marqué au sein de la ZCIT.

Éléments méthodologiques

La présente prévision est basée sur une approche statistico-dynamique qui a permis, dans un premier temps et sur une période d’apprentissage de plusieurs saisons cycloniques, d’identifier les modes de variabilité de certains paramètres de grande échelle (températures de surface de la mer, composante zonale du vent à environ 1500 m d'altitude et composante zonale du vent en haute altitude) les mieux corrélés aux paramètres descriptifs de l’activité d’une saison cyclonique (nombre de phénomènes, nombre de jours de tempêtes et cyclones, anomalie de longitude de genèse, anomalies zonale et méridienne de déplacement, typologie privilégiée de trajectoires).

Dans un second temps, nous avons utilisé les prévisions ensemblistes des modèles de climat français, européen et américain, en nous appuyant sur les paramètres prévus de grande échelle cités précédemment, afin de déterminer les paramètres prévus de l’activité cyclonique de la prochaine saison, par utilisation des relations statistiques établies lors de la période d’apprentissage. L’évaluation de la qualité de ce modèle pour chacun des paramètres de grande échelle mis en entrée sur les saisons précédentes, montre que ses performances sont les meilleures en utilisant la température de surface de la mer (paramètre le mieux prévu par les modèles de climat), la composante zonale du vent à 1500 m et - mais dans une moindre mesure - la composante zonale du vent en très haute altitude.

Nous avons complété cette approche cette année par des analyses en composites et analogues sur la période 1985-2023 pour mieux décrire la réponse de l’activité cyclonique du bassin face aux forçages de grande échelle (ENSO, DOI, DSOI).

Cette prévision a aussi été comparée à l’approche dynamique qui consiste à « compter » directement le nombre et la répartition géographique des phénomènes cycloniques tels que simulés par le modèle de climat du Centre européen.

Noms des systèmes de la saison 2024-2025

 

Noms Proposés par (genre)
ANCHA Comores (F)
BHEKI Eswatini (M)
CHIDO Zimbabwe (F)
DIKELEDI Afrique du Sud (F)
ELVIS Seychelles (M)
FAIDA Tanzanie (F)
GARANCE France (F)
HONDE Malawi (M)
IVONE Mozambique (F)
JUDE Seychelles (M)
KANTO Madagascar (F)
LIRA Lesotho (M)
MAIPELO Botswana (F)
NJAZI Malawi (F)
OSCAR France (M)
PAMELA Tanzanie (F)
QUENTIN Kenya (M)
RAJAB Comores (M)
SAVANA Mozambique (F)
THEMBA Eswatini (M)
UYAPO Botswana (N)
VIVIANE Maurice (F)
WALTER Afrique du Sud (M)
XANGY Madagascar (M)
YEMURAI Zimbabwe (F)
ZANELE Lesotho (F)

NB: Les phénomènes cycloniques provenant des zones de responsabilité indonésienne ou australienne (à l'est de 90°E), gardent leurs noms d'origine.

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